image: « Lux » de l’artiste Tomek Jarolim (application)
Projet D’Exposition à la Galerie Odalys Madrid
Artistes: Nicolas Schöffer, Carlos Cruz Diez, Santiago Torres, Antoine Schmitt, Lab(au), Pe lang, Bolognini, Tomek Jarolim, Fabien Léaustic, Pascal Dombis. Félicie d’Estienne D’Orves, Raul Valverde, Asdrubal Colmenarez.
Textes: Dominique Moulon et Alfonso de la Torre
Origine et diversité des pratiques numériques contemporaines
Préface d’une exposition à la galerie Odalys par Dominique Moulon
C’est lors d’un échange informel avec le curateur anglais Mike Stubbs[1], alors que nous envisagions ensemble les possibles origines des pratiques artistiques émergentes, que ce dernier m’incitât à reconsidérer l’apport essentiel de Johannes Gutenberg. Car en inventant les caractères mobiles en plomb aux alentours des années 1450, l’imprimeur et typographe allemand a grandement participé à la multiplication des accès au savoir et à la connaissance dont nous ne vivons actuellement que l’accélération. Sans omettre, si l’on considère l’ouvrage L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique[2] rédigé en 1935 par Walter Benjamin, que cette même innovation ne fut pas sans agir sur la sphère de l’art. Or c’est avec une citation étrangement prémonitoire de Paul Valéry que le philosophe allemand initie son essai : « Comme l’eau, comme le gaz, comme le courant électrique viennent de loin dans nos demeures répondre à nos besoins moyennant un effort quasi nul, ainsi serons-nous alimentés d’images visuelles ou auditives, naissant et s’évanouissant au moindre geste, presque à un signe. »[3] Quand quelques décennies plus tard, c’est en empruntant les canalisations “d’eau, de gaz et d’électricité” que l’Internet à haut débit a pénétré “nos demeures”.
S’il était une tendance numérique de l’art – parfois requalifiée de “post-internet” – elle serait conséquente aux usages artistiques des Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC). « J’ai toujours pensé que l’art, c’est de la communication »[4], nous dit l’artiste cinétique vénézuélien vivant à Paris Carlos Cruz-Díez alors que c’est l’excès, dans le travail de Pascal Dombis, qui fait œuvre car l’Internet est aussi le lieu de tout les excès. S’il était une tendance numérique de l’art, elle serait aussi la conséquence des échanges historiques entre les sciences et les arts que Léonard de Vinci cristallise si l’on considère les écrits de l’Italien Giorgio Vasari : « Le roi de France vint à Milan ; Léonard, prié de lui faire quelque chose d’original, fabriqua un lion qui marchait quelques pas, puis s’ouvrait la poitrine qu’il montrait pleine de lys. »[5] L’idée que les œuvres puissent s’émanciper, ne serait-ce que partiellement, du contrôle des artistes qui les ont pourtant créées n’est en effet pas récente. Mais il faudra attendre l’après-guerre avec l’émergence des premiers ordinateurs entièrement électroniques pour qu’elle se concrétise enfin. Or cette émergence machinique tant attendue est aussi accompagnée, dès 1948, par la pensée du mathématicien américain Norbert Wiener qui pose alors les fondements d’une science des système et du contrôle : la Cybernétique[6]. Ce courant de pensée étant des plus transdisciplinaire, il est naturel que des artistes, à l’instar de Nicolas Schöffer, s’en soit saisi fondant ainsi une tendance artistique dont il est le représentant essentiel : l’Art Cybernétique. L’artiste français d’origine hongroise, crée alors des sculptures qu’il qualifie de cybernétique ou de spatiodynamique et dont certaine sont autonomes. C’est le cas de “CYSP 1” qui, présentée en 1956 sur le toit de la Citée Radieuse de Le Corbusier, interagit avec les danseuses et danseurs du Ballet de Maurice Béjart. Equipée de capteurs dont on imagine aisément la provenance industrielle, cette œuvre s’inscrit dans la continuité des automates que réalisaient les artistes-ingénieurs aux talents d’horlogers du siècle des lumières. Dans un même temps, elle préfigure aussi les installations artistiques qui commenceront à se multiplier du fait de la démocratisation de l’électronique, et surtout de l’informatique, à partir des années quatre-vingts.
Dans les années cinquante, Paris attire encore beaucoup d’artistes de l’international. Notamment d’Amérique du Sud et plus précisément du Venezuela ou d’Argentine d’où est originaire Julio Le Parc qui participe en 1963 à fonder le GRAV ou Groupe de Recherche d’Art Visuel. Il a pour habitude de dire que, contrairement à bon nombre de ses amis artistes qui se fournissent encore chez les marchands de couleurs, c’est aux rayons bricolage des supermarchés qu’il se procure les mécanismes activant encore ses pièces aujourd’hui. Car c’est un art du moteur et de la non détermination que pratique Julio Le Parc dans son atelier pour que le public des centres d’art ou galeries puisse s’adonner à la contemplation des scintillements de lumières blanches qu’elles génèrent. Carlos Cruz-Díez, lui, qui vient de Caracas et s’établit aussi à Paris au début d
es années soixante, préfère les moirages d’un art davantage “Optique” pour inciter les spectateurs de ses œuvres à se déplacer dans l’espace. S’il est une constante aux recherches de Nicolas Schöffer, de Julio Le Parc, de Carlos Cruz-Díez et de tant d’autres artistes de l’Art Cinétique, c’est le bien mouvement. Et ce, qu’il soit inhérent aux œuvres elles-mêmes, consécutif aux échanges qu’elles initient avec les spectateurs, ou bien qu’il s’agisse des déplacements des regardeurs désirant éprouver les formes ou objets selon les points de vue qui les libèrent des lois de la physique.
S’il était une tendance numérique de l’art, elle s’inscrirait donc dans la continuité des pratiques du mouvement qui s’installent dans la durée. Avec un regain d’intérêt de la part des jeunes générations pour l’électronique et le code à l’ère de l’Open Source, donc de l’accès partagé aux technologies qui façonnent nos sociétés contemporaines. Mais nous nous devons aussi de mentionner les artistes du son et de l’image. A commencer par ceux d’un art sonore qui émerge avec les avant-gardes italiennes et russes. Car les artistes du son se sont toujours intéressés aux technologies de leurs environnements immédiats, c’est-à-dire à l’électricité, à la radiophonie, à l’électronique et à l’informatique. Or, il en est de même pour les artistes de l’image en mouvement bénéficiant des innovations cinématographiques, vidéographiques ou numériques du vingtième siècle. L’art vidéo constituant un cas d’école tout à fait intéressant car il émerge d’une innovation de la fin des années soixante, à savoir la célèbre caméra Sony Portapak. Avec la démocratisation et la portabilité de ce nouveau matériel, apparaît donc la pratique du circuit fermé que l’arrivée des webcams relancera quelques décennies plus tard. Sans omettre la pratique de l’auto filmage que YouTube réactivera en 2005 avec son slogan “Broadcast Yourself” ! La vidéo a pourtant cessé d’être une tendance en devenant, durant les années quatre-vingt-dix, le médium d’un art contemporain protéiforme. Au médium vidéo, il aura donc fallu une trentaine d’années, à compter de son émergence, pour être enfin admis dans les grands événements au point que la théoricienne française Françoise Parfait le considère, au début des années deux-mille, tel “un art contemporain”[7].
S’il était une tendance numérique de l’art se situant à la croisée de l’usage des systèmes autonomes, du contrôle des moteurs et des pratiques mêlant le son à l’image, c’est avec la multiplication des ordinateurs personnels des années quatre-vingts qu’elle aurait pris son essor. On considérait alors le numérique tel un assemblage d’outils. Mais c’était avant que l’Internet, dans sa version participative de ses dix dernières années, n’en fasse la culture de tous ou presque. Plus besoin, alors, d’expliquer la machine ou le réseau pour évoquer une œuvre qui en serait la conséquence. La pédagogie n’étant plus de mise, nous n’évoquons aujourd’hui que l’art ou la société au travers d’œuvres dont on ne sait jamais véritablement la part de numérique ou de réseau. Combien de créations auraient ainsi été peintes ou sculptées après que des artistes aient été stimulés par les résultats de leurs recherches sur Internet ? Et l’on voit poindre, en galerie comme en institution, des événements considérant enfin les pratiques numériques, entre autres usages du réseau, dans le champ de l’art à New York comme à Berlin, Paris ou Londres où se tient en 2016 l’exposition “Electronic Superhighway[8]”. Organisée par la Whitechapel de Londres, elle dresse un panorama des pratiques artistiques technologiques de ses cinquante dernières années en nous incitant à les reconsidérer comme autant de pratiques d’un art contemporain plus protéiforme aujourd’hui que jamais.
S’il était une tendance numérique de l’art, elle se serait par conséquent progressivement dissoute dans l’art contemporain. Mais il conviendrait toutefois de signaler les spécifiés des pratiques ou usages qu’elle aurait initiée. Considérant des artistes comme les Français Laurent Bolognini ou Félicie d’Estienne D’Orves qui poursuivent les recherches de Julio Le Parc en créant avec la lumière, les technologies du numérique leur permettent de la contrôler. C’est ainsi que Laurent Bolognini, littéralement, compose les circonvolutions des points de lumière de ses œuvres. En alternant entre des phases d’une extrême vitesse, celle là-même de l’infiniment petit, et des séquences à la relative lenteur correspondant davantage aux temporalités des astres ou planètes. C’est le temps qu’il sculpte en le reconfigurant par la lumière. L’idée que la lumière, comme la musique, puisse s’écrire se vérifie dans le travail de Félicie d’Estienne d’Orves qui, à ce propos, aime collaborer avec des compositeurs de musiques électroniques. Ce qui lui permet, régulièrement, de s’extraire de la black box pour investir la scène d’où provient aussi Laurent Bolognini. Et lorsqu’elle s’adresse en 2015 aux étoiles les plus éloignées, le temps d’une Nuit Blanche parisienne et sans se soucier de savoir si elles brillent encore, Félicie d’Estienne d’Orves utilise l’extrême précision du laser pour nous inciter à considérer enfin la vanité de nos existences terrestres.
Au marché de l’art, on a longtemps reproché un manque de curiosité pour les œuvres du numérique et du réseau. Mais il est aujourd’hui des signes qui trahissent sa capacité à les accepter enfin. C’est ainsi que la maison Phillips de New York, en 2013, organise une première vente aux enchères dédiée aux « artistes qui usent des technologies numériques pour établir une nouvelle génération d’art contemporain »[9] en s’associant avec l’entreprise tumblr.com. Et il suffit, depuis quelques années, d’errer dans les allers de la foire de Bâle pour y découvrir quelques œuvres interactives. Comme sur le stand de la galerie Denise René, dont on sait l’attachement aux œuvres cinétiques, pour y découvrir l’artiste vénézuélien émergent Santiago Torres en train de reconfigurer l’une de ses pièces tactiles en temps réel. Lorsqu’il s’interrompt, c’est pour autoriser le public à en faire de même afin qu’ils partagent ensemble la responsabilité de l’esthétique qui en émergera. Quant aux œuvres interactives non-numériques d’un autre artiste vénézuélien de la génération de Carlos Cruz-Díez, Asdrubal Colmenarez,elles préservent toute leur part de mystère. Dans un monde du tout numérique, elles clament même leur singularité sachant que l’essentiel, pour l’artiste, réside dans la relation qui unit l’œuvre au participant, à celle ou celui qui donc la complète. Mais revenons aux problématiques que le numérique active ou réactive comme c’est le cas avec le virtuel au travers des œuvres de simulation de l’artiste espagnol vivant et travaillant à New York Raul Valverde. En reconstituant avec une précision absolue les architectures intérieures des musées ou galeries qui présentent ses pièces, il crée du doute en faisant du spectateur le lien entre deux espace-temps, deux possibles. Privilégiant l’idée qu’il n’y a plus en ce monde d’extrême reproductibilité, de divergences entre l’original et ses copies.
Le numérique est aussi le médium de toutes les transversalités, de tous les passages pour des artistes comme le Français Antoine Schmitt. Car son travail ne cesse de se déplacer, allant du corps à l’urbain, de l’espace muséal à celui de la scène. Avec, pour constante, l’idée que ses œuvres, du dedans comme celles du dehors, peuvent être infinies quand elles sont génératives. Il n’en établit donc que les règles sous la forme d’algorithmes en acceptant qu’elles se révèlent dans les durées qui sont celles des spectateurs. Aimant l’idée qu’elles ne soient que “semi-autonomes”. Définissant leurs périmètres et temporalités dans les grandes lignes, il les libère à chaque fois qu’il les ”initialise”. Les membres du collectif LAb[au] établi à Bruxelles partagent un égal attachement pour le “code” que John Maeda qualifie “de création”[10]. Avec ce même code, ils établissent des systèmes qui prolongent les recherchent formelles des artistes d’un art concret ayant aussi inspiré ceux du mouvement cinétique. En véritables passeurs, ils dialoguent avec une histoire de l‘art que peintres, sculpteurs, designers et architectes ont ponctué d’une relative radicalité n’excluant pourtant pas l’accident que les machines, aujourd’hui, savent générer si tant est qu’on les y autorisent.
S’il est un thème, à la croisée de l’histoire des arts et des sciences, qui émerge ou ré-émerge de l’usage de supports ou médias, c’est bien l’invisible. Quand des artistes, de la génération des natifs digitaux comme le Français Tomek Jarolim, en révèlent quelques fragments aux travers d’expériences allant de l’intime au collectif. Se saisissant de l’objet résolument numérique qui nous accompagne tous et partout – le téléphone portable -, il fait œuvre de nos mouvements saccadés qui extirpent des myriades de couleurs de la lumière blanche les contenant possiblement toutes. En ce monde du tout numérique, il est aussi des artistes comme cet autre Français, Fabien Léaustic, pour questionner l’invisible avec, parfois, la plus grande des lenteurs et, toujours, au travers de processus hybridant les techniques d’hier aux technologies d’aujourd’hui. Ce dernier accumule, tel un scientifique, les expériences d’atelier pour n’en magnifier que quelques-unes en centre d’art comme en galerie. Il les réactive au sein d’installations performatives que les spectateurs complètent de leur présence en se les appropriant bien que jamais elles ne se livrent totalement.
Aux frontières du visible ou du “saisissable”, il y a encore bien des recherches comme celles que mène l’artiste Pe lang entre la Suisse et l’Allemagne. L’allure de ses œuvres est minimale, autant que les mouvements qui les animent sont insaisissables. Et peu importe de connaître la nature exacte des technologies qui les activent ! Quand se sont les lois de la physique qui sont à l’œuvre avec comme règle essentielle : la répétition. Dans la blancheur du plan, comme dans la profondeur de l’espace ou dans la durée, avec des boucles à l’infini. Cette idée que l’on peut construite et interroger en répétant une action ou une suite d’actions est aussi celle du Français Pascal Dombis. Au point, parfois, de générer de l’erreur et sachant, Internet aidant, que nous vivons dans un monde d’excès. Ainsi, sans relâche, il questionne les moteurs de recherches qui ont changé notre rapport à la connaissance pour faire œuvre. Allant jusqu’à se focaliser sur les contenus que tous nous rejetons afin, les assemblant, d’en extirper une forme de beauté à l’inquiétante étrangeté.
[1] Mike STUBBS dirige la Foundation for Art and Creative Technology (FACT) de Liverpool qui est dédiée à la roduction et à la diffusion d’œuvres des nouveaux médias.
[2] BENJAMIN, Walter (2012 – Edition originale : 1955) L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité, Allia, Paris.
[3] VALÉRY, Paul (1960 – Edition originale : 1928) La conquête de l’ubiquité, in Œuvres, tome II,Pièces sur l’art, Gallimard, Paris, pp1283-1287.
[4] Visionner l’Interview MAK Series de Carlos Cruz-Diez à l’adresse vimeo.com/103115583(Dernière visite : 20/02/2016).
[5] VASARI, Giorgio (2007 – Edition originale : 1550) Vie des artistes : Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes, Grasset – Les Cahiers Rouges, 2007, p187.
[6] WIENER, Norbert (1961 – Edition originale : 1948) Cybernetics or Control and Communication in the Animal and the Machine, MIT Press, Cambridge.
[7] PARFAIT, Françoise (2001) Vidéo : Un art contemporain, Editions du Regard, Paris.
[8] KHOLEIF, Omar (2016) From Experiments in Art and Technology to Art After the Internet, Whitechapel, Londres.
[9] Visionner la page de l’événement Paddles On! organisé par Lindsay Howard à l’adressehttp://paddleson.tumblr.com (Dernière visite : 28/02/2016).
[10] MAEDA, John (2004) Code de création, Thames & Hudson, Paris.
INTERACTIVE
LAb(au) (Manuel Abendroth, Jerôme Decock y Els Vermang, 1997) · Laurent Bolognini (Saint Germain en Laye, 1959 · Asdrúbal Colmenárez (Trujillo, Venezuela 1936) · Carlos Cruz Diez (Caracas, 1923) · Félicie D´Estienne D´Orves (Atenas, 1979) · Pascal Dombis (Metz, 1965) · Tomek Jarolim (Aix-en Provence, 1983) · Pe Lang (Sursee, Suiza, 1974) · Fabien Léaustic (Besaçon, 1985)·Antoine Schmitt (Strasbourg, 1961) · Nicolas Schöffer (Kalosa, Hungría 1912- París 1992)· Santiago Torres (París, 1986) · Raúl Valverde (Madrid, 1980)
Son los artistas que presenta la GALERÍA ODALYS en calle Orfila 5, Madrid en su exposición Interactive, cuya inauguración tendrá lugar el 21 de abril de 2016 hasta el día 26 de mayo de 2016 en un horario de 11:00 a 14:00 y de 15:00 a 20:00 horas.
Una muestra evocadora de aquellos heroicos pioneros de las realidades nuevas, utópicos soñadores de un mundo mejor y más bello donde luz y movimiento, un cierto estar en suspensión la realidad, inclusive el acceso a otra dimensión, tuvieron posición destacada. Una utopía, realités nouvelles, vindicativo término continuador de la épica moderna surgida del verbo fou de Guillaume Apollinaire.
A los “Salon des Réalités Nouvelles” hay que añadir algunas otras referencias de ese tiempo, como la creación del grupo parisino GRAV (“Group de Recherche de l’Art Visuel”, 1960) o exposiciones históricas como “Bewogen Beweging” (Stedelijk Museum, Amsterdam, 1961) o “The Responsive Eye” (MoMA, New York, 1965). En el contexto español ha de citarse, colectivamente, también esos años, al grupo MENTE, creado en Barcelona (1968-1970), antesala del experimento del Centro de Cálculo de la Universidad de Madrid-CCUM, ya en el mundo cibernético de los setenta.
Estos artistas, -sumergida la Galería Odalys entre las sombras, destellos o reflejos, formas zigzagueantes o insinuándose en los planos, misterioso estadio del espacio-, podrían firmar aquel mítico y militante “Manifiesto” pergeñado por Auguste Herbin en el Paris de los cincuenta que defendía la utopía de un espacio animado en lo pictórico desde la exaltación lumínica. Búsqueda de las formas arribando hasta las experiencias de Otto Piene y el grupo ZERO, aquel que señalara que “la luz es la encarnación visible de la energía”.
Al cabo, estos artistas serán continuadores de proclamas que habían tenido también en Turner y los impresionistas otro punto de partida, el elogio de la luz: esta podría ser movediza, determinar en su indeterminación, relativizar la verdad de la visión: Constable, Degas, Monet o Hopper, instauradores de la relevancia de la luz en un mundo, hasta entonces, asaltado por la planicie de la mera representación. Sí, verdaderos nuevos románticos nuestros artistas cinético-lumínicos, interactivos poetas de la luz herederos de aquella primera máquina lumínica concebida por Moholy-Nagy: “Light-Space Modulator” (1922-1930), sustrato de obras del imaginantedinámico Nicolas Schöfer, presente en la exposición.
Transmutación, pues, de una energía invisible deviniendo, lo creado, un acto más bien del pensar, y no sólo cuestión de formas plásticas, refiriendo además la relación del cuerpo con el espacio que se habita: lo invisible puede construir lo visible. Cuadros transformables por el espectador, es el elogio de lo inestable o inacabado, planteando así la posible abolición del espacio existente, la distancia, entre la obra y su contemplador. O, en palabras de Duchamp, sería el contemplador quien concluiría la obra de arte. Objetivo que, al cabo, acaba mencionando esa otra vieja utopía de los artistas de la Bauhaus: que la estética invada la vida cotidiana, pues es bien cierto que ya desde el precursor Agam, algunos artistas op-art extendieron sus búsquedas en lo real como estela inasible.
No es este exactamente un arte de tangibilidades sino, más bien, elogiador de la liviandad y el misterio, de unos ciertos jeroglíficos de luz surgiendo entre otro laberinto: el de la supuesta conformación de lo real. Una aventura cuya esencia es inmaterial, mas que elogia lo construido, arte de creadores de formas herederos de aquellos, tantos, artistas que soñaron siempre con líneas y extraños fulgores venidos de donde no se sabe. Formas expandiéndose en un cierto elogio del dinamismo y que, haciéndolo, intangibles, evocan la ilusión de un nuevo mundo dimensional, rememorando las reflexiones que sobre el diagrama en el arte hiciera Deleuze. ¿Tesoros, nos decía Vasarely?. Creación que evoca una cierta escritura donde la luz podría revelarse en el aire: haces, rasgos de luz, líneas que se desplazan con aire caprichoso en el espacio, formas en movimiento, -sombras portadas, que diría Marcel Duchamp-, emulando, parece a veces, el vértigo de un viaje de la nada sobre la nada: la materia incorpórea -el torrente de sus partículas- sobre la aparente nada del espacio, hasta construir unas ciertas redes que conformarán, a su vez, otra nueva entidad, recordando el tiempo es materia del arte develado en el espacio. Meditando en torno a los enigmas de la luz y realizando tal indagación sobre la posibilidad de transfiguración de formas de fulgor impalpable, ilusión por tentar espacios desconocidos que vagan incandescentes por el espacio. Para estos creadores lumínico-cinéticos, propulsores de la interactividad del espacio plástico, el trabajo creativo se realiza no tanto en el espacio físico, en el espacio real en el que se mueven las cosas, como en ese otro punto ignoto, tan misterioso, reino intermedio de las vibraciones, donde sucede la percepción de quien contempla sus obras. Por tanto, su arte es un arte de dudas sobre lo que percibimos, más que de certezas y, en cierta medida, -sugiriendo que lo que llamamos ‘realidad’ no es más real que el inasible espacio que construye el aire-, proponen que lo percibido, lo que cada persona percibe, no deja de ser una construcción mental de lo real puesto permanentemente a prueba con sus obras. Misterio del espacio, lo suyo es indagar en torno a tensiones de líneas y sombras, surgimiento u ocultación de formas o volúmenes, subrayando la posibilidad de reconvertir el espacio en una suerte de ámbito distinto, ineludible tal condición de su viaje de la mano del tiempo. Prosecutores de inefables extensiones, delineando los contornos de las cosas, las existentes u otras aparecidas en el espacio, no es extraño emparenten con aquella vieja ambición de los pintores por atrapar la luz, empeñados en pintar la luz casi como un elemento corpóreo, acariciando el ángulo de una pared, sobre las líneas de un tejado, flameando hasta constituir el paisaje.
El arte, al cabo un diálogo misterioso con el Universo, promueve los enigmas y los artistas ahora expuestos en “Interactive” plantean la zozobra de los espacios físicos, elevando otra cartografía de lo real. Y esta realidad parece ser nuevamente revelada con la interactividad o la presencia de la luz componiendo un espacio en elongación que entonces parece portar una cierta intangibilidad, deshecho en ocasiones de su peso, desmaterializado, interrogado por nuevas luces superpuestas a la realidad, semejando demandar sobre la percepción que tenemos de la misma. Vaivén de las líneas, flujo del surgimiento, moroso, en ida y vuelta, de la luz. Erigir un trazo de luz en el espacio supone proponer un territorio de meditación sobre lo no formulado: proponer un signo, una epifanía luminosa de acordes extraños que eleva la posibilidad de la poesía. Conversación trazada en el espacio, como en la imposible plenitud del primer día u, otra lectura, la poética, la mención a su intento de repoblar el mundo de los objetos con el primer misterio elemental, la luz, enigmático nacimiento en el espacio, hierofanía de la revelación de un nuevo mundo elevado sobre la nada.
También el movimiento, dirá Denise René, simplemente estaba en el aire, respondiendo casi tautológicamente a la cuestión sobre el objetivo de la mítica exposición “Le mouvement”, en la primavera de 1955 Quizás recordando numerosas utopías donde los artistas se preguntaron por las formas y la posible interactividad del espectador. La vieja utopía futurista ya era elogiadora de un arte inquieto, del desplazamiento y la promisoria velocidad, que se constituiría casi en un asunto estético y moral. También el suprematismo malévitchiano concluía refiriendo un extraño estar del arte en el espacio, la defensa de una vibración de las formas equiparadas a una suerte de cósmico movimiento, universal temblor que confería el espíritu moderno, que también defendieran Gabo o Pevsner. Algo que nos obliga a citar la maquinaria cubista y su mundo, lo real, en permanente de-re-des-construcción.
La obra deja de ser un objeto terminado listo para integrarse en el mundo del arte y pasa a convertirse en configuradora de un medio humano, orientándose hacia la obra de arte total propugnada por Schwitters desde el dadaísmo, o Lissitzsky en la tendencia constructiva. Ilusión de un nuevo tiempo, tentativa de encuentro del progreso con las formas plásticas, actitud de carácter melancólico al cabo, pues pensando construir, proponiendo geometrías u el ofrecimiento del número y la medida entre el desorden de lo real, se convoca a la melancolía. Investigación sobre las formas visuales, persiguiendo recursos lumínicos o cinéticos, devienen estos artistas en poetas del mito de la luz a la búsqueda del serio juego de las formas. Más luz, más luz, entre la realidad o la ilusión, un quehacer revelador, -por encima de autores, tiempos, materiales y técnicas-, de un conjunto de artistas extraterritoriales, entrópicos y misteriosos, viajeros denodados en ese tembloroso interregno que desvela el encuentro entre el espacio ilusorio y el real.
Alfonso De La Torre